A La Réunion, on a la dengue, qui pose souci notamment pour les femmes enceintes. Du 27 janvier au 3 février, pas moins de 81 cas ont été diagnostiqués sur l'île, motivant les autorités locales à rappeler les règles de prévention. Ailleurs dans le monde, c'est le paludisme qui pose problème. Les femmes enceintes sont une fois de plus en ligne de mire. « Le paludisme pendant la grossesse représente un problème de santé publique majeur dans les régions où la maladie est endémique, augmentant de manière substantielle les risques pour la santé de la mère et de l’enfant à naître», souligne l'Inserm.  Les risques ?  Un faible poids de naissance pour le bébé et un sur-risque de mortalité néonatale. 

Utiles à toutes les jeunes femmes, autochtones ou de passage

Les populations locales bénéficient en général d'une immunité contre la maladie tout au long de l’enfance. « Cette immunité est mise en défaut pendant la grossesse car les globules rouges infectés par le parasite Plasmodium falciparum à l’origine du paludisme s’accumulent au niveau du placenta, favorisant l’anémie et l’hypertension maternelle, précise l'Inserm. La maladie est aussi associée à un risque plus élevé de fausses couches spontanées, d’accouchements prématurés et de retards de croissance intra-utérin qui induisent une insuffisance pondérale à la naissance et un taux de mortalité infantile important. » 

En Afrique Sub-Saharienne, 11 millions de femmes enceintes ont ainsi été infectées par le paludisme en 2018. Elles ont donné naissance à près de 900 000 enfants en insuffisance pondérale. Les femmes africaines et leurs bébés seront donc les premiers bénéficiaires du vaccin en cours de validation. Mais si ce vaccin était validé et commercialisé, il pourrait également être utile aux femmes en âge de procréer de toutes les autres contrées du monde, dont La Réunion, qui doivent se rendre ou vivre momentanément dans un pays touché par le paludisme pour des raisons familiales, professionnelles ou de tourisme. 

Un vaccin à l'étude depuis 20 ans

Fléau sanitaire d'importance en Afrique sub-Saharienne, le paludisme a fait l'objet de nombreuses recherches. Ainsi, depuis une vingtaine d'années, une équipe de chercheurs Inserm et Université de Paris, menée par le directeur de recherche CNRS Benoît Gamain, travaille au développement d’un vaccin contre le paludisme gestationnel. L'objectif est de prévenir jusqu’à 10 000 décès maternels et 200 000 décès infantiles par an. « Développer un vaccin efficace à destination des jeunes femmes avant leur première grossesse est une priorité afin de réduire la mortalité liée au paludisme. La stratégie vaccinale efficace pourrait cibler une population similaire à celle ciblée par la vaccination HPV par exemple, avant le premier rapport sexuel », souligne Benoît Gamain. 

Des essais rassurants et prometteurs

Baptisé Primvac, le vaccin avait récemment été produit en grande quantité conformément à la réglementation en vigueur. Dans un essai clinique publié dans Lancet Infectious Diseases, les chercheurs apportent à présent des données sur la sécurité du vaccin et sur sa capacité à induire une réponse immunitaire adaptée, jusqu’à 15 mois après la vaccination initiale.

Le vaccin a été évalué chez 68 femmes non enceintes âgées de 18 à 35 ans à Paris au centre d’investigation clinique Cochin Pasteur puis au Burkina Faso au Centre national de recherche et de formation sur le paludisme à Ouagadougou. Les participantes ont été réparties et randomisées en 4 cohortes, recevant le vaccin à différentes doses, à 3 reprises sur une période de 3 mois. Ces femmes ont ensuite été suivies pendant 15 mois afin d’identifier et de prendre en charge d’éventuels effets indésirables et d’étudier la réponse immunitaire induite par la vaccination. 

« Nous avons pu montrer que le vaccin est bien toléré, à toutes les doses testées. Les effets indésirables relevés concernent principalement des douleurs au site d’injection. Par ailleurs, nous avons mis en évidence que la quantité d’anticorps générés par le vaccin augmente après chaque vaccination et que ceux-ci persistent pendant plusieurs mois. Il semble donc que le vaccin ait une capacité à déclencher une réponse immunitaire durable et potentiellement protectrice », souligne Benoît Gamain, le directeur de recherches.

Etudier cette réponse immunitaire à plus long terme et la protection associée fera l’objet de futurs essais cliniques. Les chercheurs veulent notamment continuer à suivre les 50 volontaires burkinabées afin d’évaluer si cette réponse immune induite par la vaccination se maintient jusqu’à leur première grossesse.

www.formeetbienetre.re / Le quotidien santé de La Réunion